Surperformance du non-coté : une question de gouvernance
Depuis le début de l’année se multiplient les commentaires sur la surperformance du capital-investissement par rapport aux actifs cotés, et sur l’attrait des investisseurs pour cette classe d’actifs. Si certains avaient pu croire à un effet de mode lié au fait que la Bourse a connu en 2018 sa pire année depuis 10 ans, il n’en est rien : malgré le rebond des marchés boursiers, les volumes d’échanges restent faibles et témoignent de la prudence des investisseurs.
Alors pourquoi une telle désaffection ? Tout d’abord, les coûts de cotation ont augmenté, le seuil d’accès au marché boursier a été relevé et le capital-investissement s’est imposé comme la meilleure solution pour financer les petites et moyennes entreprises de qualité, notamment en Europe où aucun véritable marché small-cap n’a réussi à émerger.
Cet argument réglementaire est d’autant plus valable depuis l’entrée en vigueur de MiFID2 qui a eu pour conséquence une réduction drastique de la couverture par les analystes. Privées de couverture significative, handicapées par une liquidité insuffisante et des valorisations dépendantes de facteurs externes plus que de la santé de l’entreprise, il n’est pas illogique que les petites et moyennes valeurs préfèrent se tourner vers le capital-investissement plutôt que vers la Bourse.
Mais une autre explication éclaire ce désamour : le capital-investissement, outre le fait qu’il est généralement moins volatil, n’a cessé de surperformer les marchés boursiers depuis plus de quinze ans, que ce soit en termes de croissance des revenus, de l’Ebitda ou de la marge opérationnelle. On estime ainsi qu’entre 2004 et 2018, le private equity a surperformé les actions cotées de plus de 500 points de base.
Si cette justification est parfaitement légitime pour expliquer la désaffection des entreprises pour la Bourse, elle exige d’essayer de comprendre les ressorts de cette surperformance récurrente du capital-investissement sur le long terme. Or la raison fondamentale de celle-ci tient en un seul mot, absent de tous les articles récents que j’ai pu lire à ce sujet : gouvernance.
Quelle que soit la taille de l’entreprise, et si l’on excepte le cas particulier de certaines entreprises familiales, la gouvernance est bien souvent supérieure dans le non-coté. L’affaire Carlos Ghosn, tout comme la scandaleuse rémunération du dirigeant de Technip alors même que son cours de Bourse est aux abysses, en sont malheureusement les tristes exemples : à force d’opacité et de manque de contrôle au sein des conseils d’administration, de trop nombreux groupes cotés pêchent par leur gouvernance.
Cela pourra paraître contre-intuitif à certains, mais la gouvernance est plus forte au sein des sociétés sous LBO. La plupart des acteurs du capital-investissement sont aujourd’hui plus impliqués, plus professionnels et mieux-disants en termes de respects des critères ESG notamment. De fait, les entreprises sont souvent mieux gérées, plus dynamiques et plus innovantes lorsqu’elles sont aux mains d’un fonds d’investissement plutôt que d’une multitude d’actionnaires passifs et d’administrateurs désarmés face à un management dont leurs nominations dépendent le plus souvent.
En effet, les sociétés de capital-investissement, en restant au capital bien plus longtemps que les investisseurs des entreprises cotées, notamment en Europe Continentale, apportent non seulement une stabilité plus forte, mais surtout une vision stratégique plus marquée et une capacité d’accompagnement de l’entreprise et de son management incomparable avec celle de la Bourse – y compris désormais en matière de financement. Cet engagement dans la durée permet alors d’aligner les intérêts des investisseurs avec ceux de l’entreprise financée, favorisant ainsi la croissance de long terme de cette dernière et in fine sa rentabilité, le capital-investisseur ne percevant son intéressement qu’à la condition que tous les investisseurs en profitent également.
Il s’agit donc de comprendre les raisons fondamentales de cette surperformance. Capital-investissement et Bourse sont tous deux nécessaires au financement de l’économie et le resteront, l’essentiel étant que les PME et ETI puissent bénéficier d’un écosystème qui leur permette de grandir et de se développer. La récente adoption de la loi Pacte est une bonne occasion d’accélérer ce mouvement et d’en faire profiter le plus grand nombre.
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